Photographier les aurores boréales :
Dans un précédent article de blog, je vous ai parlé de la photographie des aurores boréales. Ce fut l’objectif d’un voyage en Islande avec 3 autres photographes en novembre 2023.
J’expliquai alors que nous étions au voisinage d’un pic de l’activité solaire dont le cycle est de 11 années. Pour profiter de cette période encore favorable, je suis reparti 2 semaines en Islande en novembre 2025 avec Jean-Luc Augier, un grand connaisseur de l’île, passionné par ces spectacles nocturnes.
L’objectif était à nouveau l’observation et la photographie des aurores boréales, avec la même organisation flexible qu’en 2023.
Cet article témoigne de ce voyage avec quelques unes de nos meilleures images commentées, et vous explique les aspects techniques de prise de vue.
Photographier c’est écrire avec la lumière.
Un cadeau du ciel
Des conditions météorologiques très favorables dans le sud de l’île nous ont permis de très nombreuses observations. Nous avons aussi eu la chance d’arriver en Islande au moment d’une tempête solaire, qui nous a offert des aurores de grande intensité dès les premiers jours.
La prévision et le timing des aurores boréales
Nous avons utilisé principalement l’application « Aurora » sur Smartphone pour prévoir l’arrivée des aurores. Cette application indique les prévisions d’intensité, de probabilité d’observation et de couverture nuageuse. Elle indique aussi en temps réel la carte de couverture de la zone d’observation avec les couleurs corespondantes à l’intensité.
La copie d’écran ci-contre montre la carte de l’aurore au moment de notre observation la plus intense le mercredi 12 novembre 2025. Le Kp que j’explique plus loin était alors égal à 8,33 !
L’heure d’arrivée des aurores a été très variable. Les moments les plus actifs ont cependant été observés entre 23h30 et 3h00. Elle peut aussi s’estomper puis revenir plus forte 30mn à 1h00 plus tard. Il faut être patient.
Aurore boréale puissante et au déplacement rapide au lagon de Svinafell le 12/11/2025 à 23h56 (Kp 8.33)
L’indice Kp (ou indice planétaire K) mesure l’activité géomagnétique liée aux aurores boréales.
Il varie sur une échelle de 0 à 9 :
Chaque unité supplémentaire représente une augmentation exponentielle de l’activité géomagnétique qui est à l’origine des aurores boréales. L’indice Kp est donc utilisé pour prévoir et mesurer l’intensité des aurores boréales.
Kp = 0 → activité géomagnétique très faible (aucune aurore visible, même dans le Grand Nord).
Kp = 3 → activité modérée (aurores visibles uniquement dans les zones proches du cercle polaire). En Islande les aurores sont majoritairement vertes et peuvent ne pas monter haut, au-dessus de l’horizon.
Kp = 5 → seuil de tempête géomagnétique mineure (aurores visibles plus au sud que d’habitude, par exemple en Écosse, Islande, ou sud du Canada). En Islande, les aurores offrent de belles couleurs vert et rouge. Elles sont aussi bien visibles à l’oeil nu.
Kp = 7 à 9 → tempête géomagnétique intense à extrême (aurores visibles parfois jusqu’en France ou dans le nord des États-Unis). C’est ce que nous avons eu les 11 et 12 novembre. Les aurores sont alors très dynamiques et montrent des couleurs également jaune, bleu et mauve, comme ci-dessous observées au phare de Dyrholaey.
Une tempête solaire génère des aurores multicolores à Dyrholaey le 12/11/2025 à 2h45. La couverture de l’aurore a permis également de l’observer en direction du sud.
Un peu de technique photographique face aux aurores
En toute fin de cet article, je vous livre mes conseils de photographe pour la prise de vue des aurores boréales. Passons d’abord aux autres belles images de la semaine 🤩
Mise en scène de Jean Luc Augier en attendant en vain l’aurore sur le superbe site du Vestrahorn. Nous sommes revenus 3 nuits sur ce site sans avoir vraiment vu l’aurore monter et « danser » au dessus du relief. C’est une question de chance aussi.
La ronde des étoiles au dessus du Vestrahorn, prise en pose longue de 30mn en attendant l’aurore qui malheureusement n’est pas plus venue ce soir là (site de Stokksness à 0h30)
Photo panoramique d’une aurore de faible Kp prévisionnel (entre 2 et 3), malgré tout superbe et mouvante, proche de Hella (23h40). Assemblage de 3 photos prises au 14mm.
L’aurore commence doucement à apparaître au dessus d’Eskifjordur (Fjords de l’Est). il est 19h30.
L’aurore boréale commence à monter et danser au dessus des fjords de l’Est (22h08)
Les aurores de faible puissance (Kp jusqu’à 2 ou 3) peuvent être trés belles. Partis tôt selon les prévisons d’Aurora, nous l’avons attendu plus de 2 heures. Photo prise à 0h40.
Toutes les photos de cet article ne sont pas libres de droit. Me contacter en particulier si vous en souhaitez un tirage.
La fin de cet article est destinée aux photographes.
Je vous partage mes conseils pour photographier les aurores boréales.
Voici quelques indications techniques pour les personnes qui souhaiteraient en photographier. Tout cela est applicable également pour toute photo nocturne.
- Pensez à prendre une lampe frontale et même une deuxième en rechange, car sans elle, vous seriez très handicapé·e. L’utiliser le stricte minimum pour ne pas géner les autres photographes et laisser vos yeux s’habituer à l’obscurité. Environ 20mn sont nécessaires pour cela.
- Photographiez en mode manuel (M)
- Utiliser un trépied solide et stable s’il y a du vent, mais surtout facile à régler dans l’obscurité à l’aveugle avec des gants. C’est bien de s’entraîner avant.
- Il peut faire très froid (-8°C). Pensez sérieusement à votre solution pour les mains permettant de manipuler le matériel photo : sous-gants, gants chauffants, chauferettes. etc …). Nous avons utilisé des chaufferettes de la marque Hothands, excellentes.
- Utiliser si possible des objectifs lumineux à très grande ouverture. Mes images ont été prises à ouverture maintenue à f/2.8
- Utiliser un objectif Ultra Grand Angle. Mes photos ont presque toutes été prises à la focale de 14 mm, très peu à 24mm.
- Régler la Balance des Blancs sur « Soleil ».
- Choisir une sensibilité qui va limiter le bruit numérique dans les images. Les outils de post-traitement actuels permettent de monter assez haut en sensibilité tout en garantissant une excellente qualité d’image. Le niveau dépend de votre boitier. Avec le boîtier Nikon Z8, je suis resté à 6400 Iso pour assurer également un temps de pose adapté au mouvement des aurores. Ne pas passer en Iso auto.
- Mon temps de pose a varié de 2s pour des aurores intenses à 10s en début de soirée lorsque l’aurore commence tout juste à apparaître.
- Un boîtier hydride est plus adapté qu’un boîtier reflex pour cadrer dans l’obscurité. En particulier, l’utilisation de l’horizon virtuel est très utile pour ne pas devoir recadrer en post-traitement.
- Attention à la mise au point. Vérifiez bien la netteté des étoiles et dévérouillez l’autofocus. Vous pouvez aussi bloquer la bague de netteté avec du gaffer (ruban adhésif noir) pour éviter toute fausse manipulation. Vérifiez régulièrement pendant la soirée.
- Baisser la luminosité de l’écran arrière de votre boîtier. Sinon vous allez trouver vos images sur-exposées à tort. Regardez plutôt l’histogramme pour vérifier votre exposition.
- Sur mon boitier hybride, j’ai désactivé la visualisation des réglages de prise de vue à l’écran, sinon je ne voyais rien.
- Exercez-vous en photo nocturne avant de vous retrouver devant les aurores. Avec l’excitation, le vent, le froid, la nuit et le terrain parfois compliqué, vous devez avoir acquis des automatismes. Après une ou 2 soirées sur place les réflexes sont là, mais il vaut mieux éviter de manquer les premières aurores si elles sont belles.
- Charger les batteries et en avoir une de rechange dans la poche.
- Pour ne pas bouger en pose longue, utilisez un déclencheur filaire ou en connexion Bluetooth, mais vous pouvez aussi déclencher en utilisant le retardateur à 2 secondes laissant le temps au boîtier de se stabiliser.
- Quand l’aurore est peu puissante, vous pouvez composer vos images en intégrant un personnage qui peut être vous-même en utilisant le retardateur. Et lorsqu’elle n’est pas encore montée, vous avez le temps de capter les filés d’étoiles.
- Enfin, pensez à la composition de vos images en y intégrant le relief, et au premier plan, en recherchant des zones réfléchissantes, la plupart du temps aquatiques : bord de rivière ou de lagune, glace, neige, mer …
Excellent shooting !













